L’approche traditionnelle vise à séparer une problématique en plusieurs
problèmes, en les simplifiant, en les réduisant à leur plus simple expression.
Cette vision mutilée des phénomènes conduira nécessairement à des actions
mutilantes, qui n’auront considéré qu’un aspect de la réalité. Ainsi dans
l’entreprise, l’aspect technique ou l’aspect financier sont souvent considérés
isolément des aspects humains, et on connaît le résultat : les changements
voulus ne s’opèrent pas, démotivation, gâchis dans l’emploi des compétences,
etc.
Le principe de complexité demande à relier tout en distinguant
(Edgar
Morin)
3. Le changement
L’entreprise est condamnée à évoluer en permanence sous peine de disparaître,
le changement est donc à l’ordre du jour, en particulier dans le cadre de la
démarche qualité.
Est ce facile ? Malheureusement non, c’est dans la nature humaine. Le
maintien d'un équilibre acquis est difficile à modifier, c'est la propriété
d'homéostasie "demeurer constant" (découverte par le physiologiste Walter CANNON
en 1932, à propose de l'organisme humain). Cette propriété s'applique à de
nombreux systèmes (voir à ce sujet le
Macroscope de Joël De Rosnay)
On trouve toujours quelques bonnes excuses pour ne pas changer…
 | Nous avons déjà essayé cela auparavant. |
 | Cet endroit est différent. |
 | Cela coûte trop cher. |
 | Cela dépasse le cadre de nos responsabilités. |
 | Nous sommes bien trop occupés pour faire cela. |
 | Ce n’est pas de mon ressort. |
 | Ce changement est trop radical. |
 | Nous n’avons pas le temps. |
 | Il n’y a pas assez d’aide. |
 | C’est trop petit ici. |
 | Ce lieu ne s’y prête pas. |
 | Les employés ne l’accepteront jamais. |
 | Les syndicats s’y opposeront violemment. |
 | Nous ne l’avons jamais fait auparavant. |
 | Cela va à l’encontre des règlements. |
 | Pourquoi changer ? Cela fonctionne encore bien. |
 | Cela peut fonctionner dans votre département mais pas dans le mien. |
 | Nous avons toujours procéder ainsi. |
4. Le
diagnostic pour commencer
" La qualité ce n’est pas une destination mais un voyage "
La démarche qualité est un voyage proposé à l’entreprise vers la destination
" excellence ", jamais atteinte parce que toujours redéfinie à mesure que l’on
avance, mais qui doit rester le phare qui guide.
Elle se mènera par projets successifs, de petites tailles afin de créer une
dynamique du succès.
Il n’y a pas de Recette ou de Méthode toute faite pour la démarche
qualité. la recherche de la méthode se fait chemin faisant. (voir à ce sujet les
travaux d'Edgar Morin sur la complexité, ou il aime citer le poète espagnol
Antonio Machado "Caminante no hay camino,
Se hace camino al andar"
Elle dépend de la spécificité de l’entreprise :
 | Taille |
 | Type d’activité - secteur |
 | Positionnement sur le marché |
 | Personnalité des dirigeants |
 | Type de management pratiqué |
 | Ressources disponibles |
 | Histoire de l’entreprise |
 | Culture de l’entreprise |
 | Influence des syndicats, etc. |
Une stratégie de mise en place d'une démarche qualité peut parfaitement
fonctionner dans le contexte d'une entreprise A et être un fiasco dans le
contexte d'une entreprise B. C'est cette contingence qui rend ce métier
passionnant.
La phase de préparation commence par le diagnostic. Cette phase
essentielle ne doit pas être trop courte, il s'agit de bien préparer la future
démarche.
Un voyage nécessite de connaître la station de départ, la première
destination choisie, le trajet adopté et la position tout au long de ce trajet.
 | Savoir où l’on est |
 | Savoir où l’on veut aller |
 | Avec qui |
 | Comment |
La description
de la situation initiale peut être facilitée en utilisant le fascicule de
documentation X50-170 Diagnostic qualité
outre le recueil systématique de
données chiffrées (approche factuelle) :
- Niveau des indicateurs
- Coûts relatifs à la qualité, etc.
Une analyse psycho sociale devra être menée afin
de conduire le changement de manière pertinente.
5. Des conseils pour conduire le changement
Afin de ne pas se retrouver dans le scénario bien connu
" plus on change, plus c’est la même chose " il apparaît incontournable de
maîtriser le changement.
La pérennité d’une organisation et donc des emplois qui la
constituent, tient aujourd’hui pour une grande part dans sa capacité à évoluer,
à s’adapter, voire à anticiper face aux besoins nouveaux de ses clients, tout en
prenant en compte son environnement changeant lui aussi.
L’évolution de l’organisation, qui va souvent de pair avec
une démarche qualité se donne pour buts :
 | de rechercher la synergie optimale du groupe (force résultant d’une
part des compétences particulières de chacun dans les domaines qui lui sont
propres et d’autre part de l’émergence de ce groupe d’individus d’une aptitude
particulière à résoudre des problèmes complexes que chaque individu pris
séparément ne pourrait traiter). |
 | d’améliorer l’efficience de l’organisation dans l’atteinte de ses
objectifs (convergence des buts de l’organisation et des individus,
faibles distorsions dans les communications horizontales ou verticales,
conscience de la part de chacun des interrelations existantes au sein de
l’organisation elle même et avec son environnement). |
Ce type de relations, basé principalement sur les travaux de
groupe et le partage des connaissances se traduit parfois par une perte d’espace
de liberté ou une restriction de la zone d’initiative individuelle. Ces
personnes ont l’impression de perdre leur pouvoir.
Cette possibilité d’initiative étant indispensable à toute
personne dans le cadre de sa motivation et donc de sa capacité à créer, le
véritable problème posé est celui de la conciliation entre les besoins
individuels et les buts de l’organisation.
L’adhésion initiale au projet, la prise en compte des avis, l’implication
des personnels et la communication permanente s’inscrivent donc dans le cadre de
la prévention au phénomène de résistance au changement.
A partir d’un besoin exprimé par l’entreprise qui souhaite conduire un projet
qualité (ou projet appelé autrement mais qui vise à améliorer la performance
globale de l'entreprise) , concernant la situation actuelle, il s’agit de
préciser les contours de la mission, en tout cas dans un premier temps de mieux
définir la situation de départ.
Cette mission consistera à passer d’une situation initiale A donnée a priori
comme non satisfaisante, à une situation finale B en fin de mission conforme à
un objectif précis quantifiable et réalisable.
Ce travail implique la conduite d’un changement, ce qui va amener chacun à
modifier quelque peu ses habitudes de travail.
Tout le monde est sujet plus ou moins à une certaine résistance au
changement, dont les origines peuvent être :
 | Crainte de ne pas tenir compte de l’avis des intéressés |
 | Inertie inhérente à la nature de chacun |
 | Anxiété engendrée par la perspective du changement |
 | Tendance chez chacun à éviter de se désolidariser de la norme admise par
le groupe. |
La construction dans l’esprit de chacun d’une vision partagée d’un
futur allant vers un but désiré de tous apparaît alors comme un préalable
incontournable à la réussite d’un changement.
C’est dans cette optique qu’il apparaît essentiel d’associer les personnes
concernées aux différentes phases de ce changement, et en particulier dès la
phase diagnostic.
Actions |
But à atteindre |
Outil possible |
Séance de
définition de la problématique |
Informer et
recueillir l’adhésion de tous sur un projet par la construction d’une vision
partagée . Affirmation de sa propre place en tant que conseil ou
faciliteur au bénéfice de la structure dans son ensemble |
diagramme
d’affinités |
Interview des
personnels |
Mettre à jour les
" vrais problèmes " éventuels cachés derrière des insatisfactions exprimées.
Cette " confession " parfois délicate sur certains aspects doit respecter
une déontologie à même de ne gêner personne (dépersonnalisation des
problèmes).
Prendre en compte les souhaits des personnels sur la manière dont ils
veulent être impliqués personnellement. |
guide d’entretien |
Compte rendu de
diagnostic |
Impliquer les
personnes par le choix des sujets de travail retenus et des objectifs à
atteindre. |
Vote
Matrice de décision |
6. Politique
et stratégie
Avant d'aller plus loin il est important de bien situer les termes de
politique et de stratégie
La politique d’entreprise
L’entreprise en tant qu’acteur de la vie économique a besoin de se situer sur
le marché, pour cela elle doit apporter des réponses aux questions de base
suivantes qui vont constituer ses objectifs généraux:
 | Quel est mon métier ? |
 | Quels sont mes produits ou mes services ? |
 | Quels sont mes clients ? |
 | Quels sont mes concurrents ? |
La réponse à ces différentes questions va constituer la politique de
l’entreprise.
La politique relève de la direction générale et à ce titre elle considère
l’entreprise comme une totalité, alors que les autres fonctions n’en concernent
qu’un aspect (marketing, production, finances). Cette politique concerne donc un
domaine spécifique, celui où pourra s’exercer la liberté des
dirigeants de choisir tel métier, tel produit et tel client par rapport à tel
environnement concurrentiel.
La stratégie
L’exercice de cette liberté, donc des choix qui seront faits et des
modifications qu’il faudra faire, vont constituer la stratégie.
Il existe de nombreux modèles (comme ceux développés par l’université de
Harvard dans les années 60) qui permettent d’aider à l’exercice de ces choix.
Prendre des décisions, fondées sur un diagnostic précis de l’entreprise dans
son environnement de façon à atteindre des objectifs de survie et de
développement dans un univers concurrentiel et changeant qui exige des
adaptations et des innovations : telle est la raison d’être de la stratégie de
l’entreprise.
Nota : Ce terme " stratégie " d’origine grecque se réfère au général qui
décide de positionner ses troupes sur le champ de bataille. Il s’agit donc d’une
analogie quand on l’emploie dans le domaine de l’entreprise où le concurrent est
parfois comparé à l’ennemi. Heureusement il existe aussi des stratégies de
coopération !
Différence entre programme et stratégie
La stratégie n’est pas figée une fois pour toute, elle n’est pas programmée
et planifiée dans le menu détail, il convient donc de distinguer un programme et
une stratégie.
Le programme constitue une séquence d’actions définies dans le détail
et qui s’enchaînent les unes aux autres.
La stratégie est opposée au programme. Elle se construit au cours de
l’action et suppose de la part de celui qui l’élabore :
 | L’aptitude à entreprendre dans l’incertitude |
 | L’aptitude à modifier les actions menées en fonction des aléas et des
nouveautés qui apparaissent en cours de route |
La stratégie pourra comporter des segments programmés, mais elle est par
nature évolutive.
une bonne définition de la stratégie: "La stratégie est la conduite
raisonnée d'une action dans une situation et un contexte comportant incertitude
et éventuellement dangers. Une stratégie s'élabore en fonction de finalités et
de principes, envisage divers scénarios possibles du déroulement de l'action,
choisit celui qui lui semble le plus adéquat selon la situation: tantôt il vaut
mieux accepter un scénario qui minimise les risques mais également les chances,
tantôt il vaut mieux choisir un scénario qui maximise les chances mais également
les risques" ("Terre - Patrie" Edgar MORIN)
La stratégie doit considérer délibérément le futur comme incertain, non donné
mais à construire.
On parle aussi de la prospective, qui est l’art par lequel s’inventent
peu à peu les contours du futur, se distinguent les frontières du souhaitable et
du possible et se découvrent les chemins à emprunter
" Gardons le souhaitable en point de mire, mais mettons en œuvre le
possible " (31/12/2000 Jacques CHIRAC à propos de la
construction européenne)
7.
Mise en place d'un système de management de la qualité
Travailler avec un conseil
Il peut s’avérer nécessaire d’avoir recours à
une aide extérieure pour conduire cette démarche. Certaines vérités passeront
plus facilement si elles sont dites par quelqu’un de l’extérieur. Le regard
détaché du cabinet conseil peut aider l’entreprise à mieux comprendre ses
propres carences qu’elle finit par ne plus voir tant elles font parties de son
quotidien.
Attention toutefois à ce que le conseil ne se substitue ni au chef
d’entreprise, ni au responsable qualité, ni aux différents acteurs du changement
qui doivent définir eux mêmes les procédures qui les concernent.
Attention également aux méthodes toutes faites qui ont bien fonctionner
ailleurs, chaque entreprise est spécifique, le bon remède pour celle-ci ne
sera pas le même pour celle-là. (importance du diagnostic).
Pour d'autres informations sur la mise en place d'un système de management de
la qualité, je vous renvoie au travail très complet de
Nathalie Diaz.
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